Paul Gauguin et Guy de Maupassant figurent parmi les syphilitiques célèbres du début du siècle, à une époque où la maladie sévissait particulièrement, y compris (et peut-être surtout) dans les milieux intellectuels.
Cette maladie a beaucoup régressé, sans cependant disparaître. Les démarches prénuptiales comportent un examen (prise de sang) pour détecter le mal. Il en existe un aussi parmi les examens du cours de la grossesse, au troisième mois. D'autres détections peuvent être faites lors de dons de sang. Ces précautions préventives ont permis de réduire les épidémies dans les pays hautement civilisés. A l'échelle mondiale, cependant, persiste une endémicité.
La contagion
Elle se fait par contact intime avec un sujet infecté ayant des lésions cutanées, soit sur la verge chez l'homme, ou dans le vagin chez la femme, ainsi que sur les lèvres de la vulve.
Description
Un mois après le contact infectant apparaît au point d'innoculation, là où a eu lieu le contact avec la lésion, un chancre.
Le chancre est une lésion creuse, ronde ou ovale, ulcérée dans le fond, humide, peu douloureuse, à bords bien délimités, reposant sur une muqueuse durcie, cartonneuse, dite " infiltrée en bristol ".
Généralement, il n'y a qu'un chancre, mais il peut aussi y en avoir plusieurs. L'aspect peut varier, ressembler à une plaque d'herpès, à un gros point, ou encore être très ulcéré dans le fond tandis que les bords sont toujours très durs.
Ce chancre a des lieux d'élection : chez l'homme, c'est le gland et plus particulièrement le sillon du prépuce (d'où l'intérêt de la circoncision). S'il se trouve sur la peau du pénis ou sur le pubis, il est souvent croûteux. Chez la femme, le chancre s'installe sur la grande lèvre qu'il fait gonfler en oedème. S'il se trouve sur le col utérin, il passe inaperçu. Installé sur l'anus, on peut le confondre avec des hémorroïdes, sauf qu'il est dur. Cette diversité de chancres et de localisations ne facilite pas le diagnostic de la syphilis. On peut confondre avec des aphtes, une candidose génitale, de l'herpès.
Le médecin est obligé de faire un frottis à la surface du chancre et d'observer la sérosité au microscope, où le " tréponème palidum ", un spirochète en forme de tire-bouchon, est visible.
Les trois phases de la syphilis
- L'apparition du chancre constitue la première phase de la syphilis. Environ deux mois après l'apparition du chancre, une éruption de petites taches roses a lieu sur tout le corps. C'est la roséole syphilitique. Cette éruption dure de quelques heures à plusieurs semaines. Parfois, elle n'est pas décelée, d'autant moins si elle a lieu sur le tronc et les membres. Au visage et sur le cou, on la voit davantage.
- Puis à la deuxième phase apparaissent des papules rondes, rouges ou cuivrées. On peut alors penser à la varicelle ou à un impétigo, ou encore à une forme de psoriasis. Il faut examiner attentivement la peau pour s'apercevoir qu'il y a aussi une infiltration qui, elle, est caractéristique. Ces papules ont des zones préférentielles, les pieds, les lignes de la main, les abords du nez et de la bouche où elles ressemblent à de l'acné, la région anale où elles sont souvent très grosses. Le cuir chevelu est aussi atteint, mais tardivement. Les cheveux tombent, sur le front et les tempes. Dans la bouche enfin on voit apparaître des plaques muqueuses d'un blanc grisâtre, peu douloureuses. A ce stade, on ne souffre pas vraiment, mais on ne se sent pas bien dans sa peau. A ce stade également, le diagnostic est toujours difficile, car les papules ressemblent à celles de nombreuses dermatoses. Elles vont bientôt disparaître. Il faut là encore faire un examen de sang. Après de nombreux mois sans traitement, la syphilis entre dans sa troisième phase, encore qu'elle puisse s'arrêter à sa deuxième phase.
- La troisième phase voit apparaître des tubercules, c'est-à-dire des masses dures, rouge sombre, à surface lisse, faisant des squames, et enfin des gommes qui sont des sortes de petits ulcères flasques. Ces gommes se regroupent et forment de grandes ulcérations très creuses. Elles peuvent perforer le nez ou le palais. Le système nerveux et le système vasculaire sont atteints.
Traitement
Autrefois la syphilis finissait par avoir la peau du malade, au propre et au figuré. Aujourd'hui, la pénicilline en vient à bout. Tout le problème est d'éviter la contagion. Le traitement a lieu par injections intramusculaires pendant une quinzaine de jours. Les patients allergiques à la pénicilline (cause d'urticaire aiguë) peuvent être soignés avec un autre antibiotique, l'érythromycine.
Il faut traiter tous les " contacts " récents avec une injection d'extencilline.
Nota : Une syphilis peut être détectée en cours de grossesse. Le traitement sera le même. Il faut en effet éviter la transmission de la maladie au foetus. S'il est contaminé, il développera des lésions dès le quatrième mois. Il peut mourir, ou, s'il survit, ce sera avec des malformations.
Les maladies de peau liées au sexe
Parmi les maladies de peau transmises lors des contacts sexuels, la syphilis est incontestablement la plus importante et la plus dangereuse. Mais il ne faut pas pour autant négliger les autres qui peuvent causer bon nombre de désagréments.
On a pu apprendre déjà que l'herpès se communiquait par voix sexuelle, de même que les crêtes de coq, les candidoses et aussi les parasites tels que gale et morpions. On apprendra encore que l'hépatite virale B peut s'attraper par voie vénérienne. Cela a été souvent observé chez les homosexuels qui pratiquent les fellations. Le sperme véhicule en effet le virus.
Mais il existe d'autres maladies sexuellement transmissibles, que nous survolerons dans cet ouvrage car elles relèvent peut-être plus de la gynécologie que de la dermatologie, même si les manifestations se déroulent au niveau des tissus, plus particulièrement des muqueuses.